Accueils de loisirs, enjeux actuels

Fidèle à son impulsion d'origine inscrite dans l'Éducation populaire, l'accueil de loisirs se présente comme une réponse éducative possible dans le temps de l'enfant. De fait, il est aussi, dans le temps de la famille, une réponse à un besoin de garde.
Média secondaire

Au cœur de la problématique temps de l’enfant / temps de la famille, le centre de loisirs doit pouvoir proposer une réponse ambitieuse qui serait un des maillons d'une politique enfance-jeunesse cohérente sur un territoire, tant par ses relations avec l'ensemble des partenaires de l'enfant, que par ses choix pédagogiques et son mode de fonctionnement, en recentrant sa définition sur le loisir, et moins sur la garde, élément incontournable certes, mais ni unique ni premier. 


De nouvelles formes d'accueil 

Il est difficile de dresser le portrait-robot du centre de loisirs, tant aujourd’hui il peut prendre des formes diverses. La forme pionnière du centré aéré dans lequel on part à la journée, respirer l'air de la proche campagne existe toujours. Toutefois, celle-ci a depuis lors été renouvelée par la création de structures dans les quartiers et les communes périurbaines ou bien encore dans les écoles, les maisons de quartiers ou à proximité des crèches tant l'accueil des jeunes enfants s'est développé, comme en témoignent les multiaccueils.

Les plus âgés ne sont pas en reste et pour eux ont été créées des formes d'accueil renouvelées. Il faut noter aussi, depuis l'évolution réglementaire de 2007, l'apparition de l'accueil de loisirs périscolaire, lequel se substitue petit à petit aux temps de garderie qui précèdent et suivent la classe. Si, de par sa définition juridique il se présente comme un accueil de loisirs dont les exigences d'encadrement sont assouplies, dans les faits le cadre général des accueils collectifs de mineurs semble quelque peu plaqué sur un temps qui condense des volontés très disparates et pas toujours convergentes, un temps qui a parfois juste changé de nom.

Récréation, garderie, accueil de loisirs, accompagnement à la scolarité... La confusion des genres n'est jamais très loin. D'autant qu'une multiplicité d'acteurs pas toujours coordonnés se succèdent devant des enfants qui assument seuls la continuité temporelle et ce, du matin au soir. 

Un renouvellement quotidien 

Quoi qu'il en soit, ces accueils dépendent toujours du territoire dans lequel ils s'inscrivent (milieu rural, urbain, petit centre ou regroupement intercommunal), le public accueilli y est chaque fois particulier — de 2 à 17 ans, sous forme de club ou à la journée. Cela devrait donc faire autant de projets pédagogiques qui tentent de répondre aux besoins, aux envies et aux attentes des enfants et des adolescents qui fréquentent ces structures ouvertes à la journée.

Et c'est bien là une particularité du centre de loisirs, quelle que soit sa forme, son implantation, le public attendu, que de renouveler chaque jour d'ouverture l'accueil de parents, enfants, adolescents. Pour que ces projets ne soient pas qu'une réponse à un besoin de garde, les équipes doivent l'utiliser pour en faire des temps dans lesquels chacun des acteurs peut influer sur son déroulement, pour en faire un lieu organisé permettant émancipation et liberté, par le vivre ensemble et par l'agir. 

De la durée 

Certains enfants fréquentent l'accueil de loisirs toute l'année, le mercredi, durant les petites et les grandes vacances. D'autres n'y viennent que sur une période de vacances et certains seulement de façon occasionnelle. Dans l'organisation même de la journée, le choix d'une grande souplesse horaire amène certains enfants à n'y passer que quelques heures quand d'autres y seront de l'ouverture à la fermeture. Le risque est alors grand d'organiser la période ou la journée sur le plus petit dénominateur commun, c'est-à-dire le moment où tout le monde est là, parfois réduit à 10 heures - le matin et 14 heures-16 heures l'après-midi, même si certains enfants sont là bien plus tôt et si d'autres partent bien plus tard, l'avant et l'après n'étant conçus que comme des temps d'attente, hors programme.

Pourtant, à bien y regarder, l'inscription dans la durée peut être une force pour l'accueil de loisirs. La durée peut être l'occasion d'installer des fonctionnements et des projets d'activités : on peut prendre le temps de voir pousser les tomates dans un potager, de se lancer dans la fabrication au long court de jouets, de monter une pièce de théâtre ou de préparer des séjours pour les vacances. C'est sans doute en tenant compte plus complètement de cette temporalité particulière que le centre de loisirs pourra mieux prendre en compte les enfants qu'il accueille, en étant capable tout à la fois d'envisager le court et le ponctuel sans pour autant se priver de la continuité et de la durée pour s'installer et pour projeter.

C'est alors une question de dispositifs pédagogiques, l'occasion de donner envie de s'installer dans des loisirs. C'est aussi le moment durant lequel l'on reparle du planning, du programme. Car c'est un moyen simple, rapide et efficace pour préparer le centre de loisirs et diffuser son fonctionnement. Il est structuré, permet de la projection dans le temps et cadre les envies en les soumettant à l'exigence de la réalité. Il est également support de communication vers l'extérieur. Il donne à voir en peu de mots une forme du projet.

Mais on sait aussi comment le planning peut verrouiller un centre ou un projet, avec ses activités phares et l'angoisse de la case vide qui conduit à la succession d'activités. On sait qu'il empêche de s'adapter aux envies des enfants, quand il n'est pas à lui tout seul le projet pédagogique. Et puis être animateur, ce n'est pas seulement organiser des activités pour les enfants. Le centre de loisirs peut être tout simplement un lieu où accueillir prend tout son sens, un lieu où il fait bon vivre, où il fait bon venir que l'on ait besoin d'être gardé ou pas. C'est sur ce terreau que naîtront les envies, les projets d'activités, que les animateurs pourront faire surgir l'inattendu. 

Du choix pédagogique et financier 

Les accueil de loisirs, espaces d'apprentissage et d'ouverture d'esprit, doivent rester des lieux de mixité sociale dans lesquels l'enfant peut découvrir l'autre et où chacun trouve sa place. Parce qu'elle conditionne l'accès, la question tarifaire est sans cesse à interroger. Un tarif unique pour toutes les familles ne permet pas aux familles les plus modestes, ni même aujourd'hui aux classes moyennes d'en bénéficier. La CAF, par l'intermédiaire des contrats Enfance Jeunesse, accompagne financièrement les structures qui mettent en place une politique tarifaire permettant d'adapter les prix en fonction des revenus et des situations familiales.

De plus, pour que les enfants puissent venir par choix, au-delà d'un besoin de garde, la question du tarif ne doit être ni un frein ni un obstacle. Et quand le succès est là, qu'il faut gérer la fréquentation et que se pose la nécessité de fixer d'autres règles d'accès que le prix, peut-on choisir comme critère la possibilité supposée ou réelle des familles à garder leur(s) enfant(s) ? La question du tarif, en tant que face immergée de l'iceberg du coût de journée, intègre les choix pédagogiques quand ils ont une incidence financière. Certains arbitrages seront alors à opérer à commencer par le nombre d'animateurs, parfois limité au minimum réglementaire. Mais aussi le recours à des prestations, parfois coûteuses. La place et le sens de l'activité, le rôle de l'animateur sont alors à ré-interroger. Pour une écrasante majorité d'animateurs stagiaires BAFA, l'accueil de loisirs est le premier terrain d'exercice. 

De nouveaux acteurs 

Néanmoins, depuis quelques années, la massification de la fréquentation du centre de loisirs mais aussi sa municipalisation ont fait largement déborder celui-ci du seul cadre de l'animation volontaire. Aujourd'hui, bon nombre de centres de loisirs fonctionnent avec des directeurs et des animateurs permanents dont c'est l'emploi principal voire, pour certains, la profession. La présence d'animateurs volontaires est alors vécue plus comme un recours à des saisonniers ou des vacataires pour faire face à des pics de fréquentation mais elle offre aussi la possibilité de jouer sur les coûts salariaux et donc, par répercussion, sur les tarifs.

Dans ces conditions, un modèle est à construire ou à reconstruire permettant de penser et d'articuler non la cohabitation mais la co-action de professionnels formés, sécurisés dans leur emploi encadrant des animateurs réellement volontaires dans le cadre d'un engagement social et une mission éducative mieux reconnue.

On le voit, le développement massif des accueils de loisirs ré-interroge la matrice historique du centre aéré dans ses formes et modes d'organisation. Il perpétue aussi de plus anciennes questions de sens, entre autres de l'accueil, de la prise en compte de l'enfant et des publics dans leur diversité, de l'activité... que l'évolution des conditions d'organisation sociale poussent à revisiter. ■ 


Dossier n° 20 des Cahiers de l'animation vacances loisirs