LA MÉDIATHÈQUE ÉDUC’ACTIVE DES CEMÉA

Une éducatrice spécialisée se lance dans la médiation animale grâce à sa chienne

[DÉLIÉ n°15] De sa relation personnelle avec Elfy, sa chienne, au projet de création d'une ferme pédagogique. Entretien avec Annelle Darmon.
"Je suis actuellement en troisième année du diplôme d'etat d'éducatrice spécialisée et je suis en alternance dans un institut médico-éducatif auprès d'enfants porteurs de handicap,troubles du spectre autistique,trisomie, troubles du neuro-développement, de sept à dix, sept ans. Je suis avec le groupe des grands de douze à dix-sept ans."
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DÉLIÉ : Comment en est-tu arrivée à t'intéresser à la médiation animale? 

Annelle Darmon : Tout a commencé quand j'avais cinq ans. J'ai eu un chien avec un contexte familial assez compliqué, elle a été ma meilleure amie, ma confidente, mon soutien, un tiers, qui m'a permis de surmonter beaucoup d'obstacles dans ma vie et de remonter assez fièrement.

D : À quel moment t'es-tu rendue compte qu'en fait, c'était aussi une pratique reconnue dans le soin, dans le travail social ?

A D : Tout a commencé quand j'ai vu un documentaire sur un cheval, Peyo,qui venait dans un hôpital avec des personnes en fin de vie. Je me suis dit qu'il y avait vraiment un lien entre l'animal et un patient qui en avait vraiment besoin. J'ai vu plusieurs documentaires qui parlaient de ça. Donc, je me suis beaucoup intéressé à la médiation animale et j'ai vu beaucoup de documentaires, d’émissions  qui parlaient de ça.

D : Le cheval venait soutenir ces personnes, venait leur apporter quoi, en fait?

A D : On voyait qu'il y a avait des personnes assez démotivées, assez tristes,  un peu en dépression et dès qu’elles voyaient Peyo, elles étaient contentes, elles lui parlaient.Même juste se promener avec le cheval dans l'hôpital ça les apaisait.

D : Et dans la réalité, pas dans les documentaires, est-ce que tu tu as croisé, sur tes terrains de stage, des pratiques de médiation animale?

A D : J'ai fait un premier stage à l'institut médico-éducatif et j'ai vu de la médiation animale avec de l'équitation. J'ai vu que c'était plutôt brosser le cheval, prendre soin de l'animal et ça crée d'abord un premier lien, il y en avait qui prenaient plus d'assurance avec le cheval, et même dans leur vie personnelle, dans l'accompagnement qu'on fait avec eux. Un des jeunes, qui a des grosses angoisses, était moins angoissé, était plus avenant avec les professionnels, il avait aussi plus de communication avec le chien qui venait.

D : Comment tu articules le travail de l'intervenant ou l'intervenante en médiation animale avec le travail d'éducateur ?

A D : Je pense qu’il y a vraiment un lien entre les pratiques et je pense que ça peut beaucoup les accompagner, les aider à se dépasser et trouver une autre forme de communication.

D : Beaucoup  d'intervenants en médiation animale sont des éducateurs en formation initiale. Est-ce que c'est un travail d'éducateur en fait,la médiation animale ?

A D : je pense que oui.

D : D'après ce que tu m'as dit tout à l'heure, tu fais ton mémoire d'éducatrice sur la question, et c'est ce que tu vas défendre dans ton mémoire : que c'est un travail d'éducateur. Est-ce que l'animal va amener une médiation comme une autre ou est-ce que l'animal a encore quelque chose de particulier?

A D : Je pense que l'animal a  quelque chose de particulier et je pense que c’est un lien, un vrai lien qui peut vraiment aider et par exemple, moi, plus tard j'aimerais créer ma structure et faire une ferme pédagogique pour vraiment mettre ça en place.

D : Après ton diplôme d'éducatrice, tu voudrais faire de la médiation animale directement ou te former à la médiation animale en plus ?

A D : J'ai vu une formation à Angers qui forme à la médiation animale et qui nous pousse à créer une ferme pédagogique, ils peuvent nous accompagner dans ce projet

D : Dans la ferme pédagogique de tes rêves, il y aurait quoi comme animaux ?

A D : En premier c'est les chiens, les chevaux, mais aussi les chats,les gerbilles,les hamsters, vraiment je voudrais avoir tout type d'animaux qui peuvent accompagner. C'est par rapport aussi à l'enfant, quel lien il fait avec un type d'animal, il peut peut-être avoir peur d’un chien alors qu’il aura plus de sensibilité avec un chat.

D : Est-ce que les animaux ont besoin d'avoir une éducation particulière pour faire ce métier? Parce qu'en fait, c'est un métier peut-être pour les animaux ?

A D : Oui, j'ai vu des émissions qui parlaient de ça, les enfants ont des éducateurs canins pour les aider, et surtout on peut faire aussi une formation pour nous, les éducateurs, avoir un animal, un chien par exemple, l'éduquer pour qu'il devienne un médiateur pour les personnes accompagnées.

D : Est-ce que tu trouves pour ton mémoire des références théoriques par rapport à tout ça?

A D : Il y a plusieurs livres qui en parlent et qui poussent à la réflexion, qui poussent à comprendre beaucoup mieux la médiation animale, parce que chacun a sa perception de la médiation animale. Il y en qui n’ont pas personnellement vécu avec un chien comme moi pendant quatorze ans, mais pour qui c'est plutôt quelque chose qui vient comme ça. J'ai vu beaucoup de livres qui disaient que chacun a sa perception de la médiation animale, et je trouve ça très intéressant.

D : Je vais te poser une dernière question, que peut-être un petit peu plus politique. On est quand même dans une époque où on est en train de reconsidérer le rapport à l'animal, où l'animal a des droits, de plus en plus de droits, en particulier maintenant les chiens, les chats ne sont plus juridiquement considérés comme des objets, sont considérés comme des individus. Il y a des philosophes aussi, qui réfléchissent sur donner un autre statut à l'animal.
Qu'est-ce que tu penses de tout ça?

A D : Moi je suis d'accord, parce que même si on les utilise pour la médiation animale, ça ne les fait pas être un objet, c'est des personnes à part entière et je pense qu'il faut prendre en compte leurs angoisses à eux, leurs peurs, leur santé et leur bien-être, surtout pour un métier comme la médiation animale. Je pense que leur bien-être aussi passe avant l’enfant. On ne peut pas travailler si l'animal n'est pas bien.

D : Est-ce que on peut dire que quand on est éducateur, pour pouvoir être un bon éducateur, il faut être soi-même bien et que finalement ces animaux sont aussi des éducateurs et qu'il faut aussi qu'ils soient bien?

A D : Je suis d'accord. C’est un duo,

D : Est-ce que tu as des choses que tu aimerais ajouter ?

A D : Je pense que tout est dit. Pour revenir sur ma chienne, c'était vraiment une personne à part entière, quelqu'un de la famille. Quand on l'a perdue, c'était plus un manque et je pense que ça m'a donné l'envie de vraiment faire ça et c'était elle qui m'a donné l'envie de faire vraiment une formation, de mettre un projet en place, de créer une ferme pédagogique. Pour moi, c'est elle qui m'a donné cette motivation et cette foi en l'animal.

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