N'oublions pas dans les discriminations, le racisme !

Partie 2 de NELA - Parcours de sensibilisation à la lutte contre le racisme. Construction sociale du racisme.
Dans cette deuxième partie nous allons nous intéresser à la construction sociale du racisme, en prenant en compte trois éléments : la catégorisation, la hiérarchisation et l’essentialisation.
Média secondaire

Qu'est-ce que le racisme ?

Origine du mot "racisme":

Le mot racisme apparaît pour la première fois en 1902, dans La Revue Blanche des frères Natanson. Le mot "racisme" ne se généralise qu'à partir des années 1920 avec l'essor du colonialisme.

C'est une idéologie, une manière de penser induisant le fait qu'il y aurait une hiérarchisation entre les êtres humains, entrainant des comportements d'exclusion. Le racisme se nourrit principalement des préjugés et des stéréotypes engendrant des actes de discrimination. Or comme le stipule la déclaration universelle des droits de l'homme, article 1 et 2, adoptée en 1948, " Tous les êtres humains, naissent libres et égaux en dignité et en droits".

Bien que des progrès importants aient été réalisés au fil des ans, nos sociétés demeurent en proie à la discrimination et au racisme, et encore plus en période électorale. Ces derniers peuvent prendre place à l’école, dans la rue, chez soi, dans le sport, au travail, sur internet…

Mécanismes du racisme

Le racisme, est le fait de classer des individus, en leur collant des étiquettes indélébiles, leur attribuant des caractéristiques qui leurs seraient soit disant propres. Pour comprendre le mécanisme du racisme, trois éléments sont à prendre en compte : la catégorisation, la hiérarchisation et l'essentialisation

La catégorisation

Le processus qui mène à la discrimination raciale commence par la catégorisation. Catégoriser des individus, des objets, des événements, est un processus cognitif naturel nous permettant de mieux appréhender le monde qui nous entoure, ce dernier pouvant être parfois complexe. Ainsi pour le rendre compréhensible nous allons nous servir de la catégorisation, c'est-à-dire que nous allons classer, ordonner notre environnement en différentes catégories (objets, individus, événements, etc.), nous semblant au premier abord avoir des caractéristiques communes.

Il est donc naturel de catégoriser, mais les catégories ne sont elles-mêmes pas naturelles. En effet, ces catégories sont changeantes est évoluent en fonction d'une époque donnée et de l'endroit où nous nous situons.

Sexe, couleur de peau, classe sociale, religion, physique, profession, les catégories peuvent être multiples et s'appuient sur un certain nombre de critères arbitraires permettant de différencier les individus entre eux. Catégoriser de la sorte, c'est réduire les individus à une idée reçue et à un trait de leur personnalité. Cela va à l'encontre de la construction personnelle de son identité, puisque les individus se voient assigner une identité selon leur origine, religion,... réelle ou supposée. On parle ainsi d'assignation identitaire, c'est à dire que nous renvoyons une personne à une seule particularité de son identité. Elle lui attribue, assigne, des caractéristiques physiques, morales, culturelles, censées être celles de son groupe.

Classer les êtres humains s'accompagne le plus souvent de jugement de valeur, pouvant entrainer une hiérarchisation entre les individus et groupe d'individus.

Mise en pratique : Mieux appréhender la notion de catégorisation:

La démarche vise à permettre :

  1. D'identifier les caractéristiques, mécanismes, langages, liés à la notion de catégorisation;
  2. D’entamer une réflexion-débat sur l'impact des catégories au sein de la société ;

 Deux propositions pour un travail en groupe :    

1. La fiche d'identité

≈ Suggestion de consigne  :

L'animateur.ice télécharge et imprime les dix personnages. Après les avoir placés face cachée sur une table, il/elle demande aux participant.es de venir tirer au sort l'un des personnages et de prendre la fiche d'identité correspondant à celui-ci.  Dans un premier temps, ils/elles répondent individuellement aux questions de la fiche puis se mettent en binôme avec la personne ayant tiré le même personnage. Dans un second temps, ils/elles comparent et analysent ensemble leurs réponses.

Retour en grand groupe : 

L'animateur.rice, demandent à chacun des binômes de présenter son personnage et de répondre aux questions suivantes :

  • Quels stéréotypes, préjugés sont présents dans votre description ?
  • En quoi et pourquoi votre description est différente ou non de votre binôme ?

→ Les dix personnages

→ Les fiches d'identité
 

2. Jeu des familles

≈ Suggestion de consigne  :


Par petit groupe de 4 et en appui du jeu de cartes des familles à télécharger ci-dessous.
Réunir les cartes qui vous semblent appartenir à la même famille. Pour chaque famille, trouver un nom et expliquer votre choix.  Puis retour en grand groupe, où il vous sera demandé de présenter vos familles et expliquer vos choix.

→ Le " jeu des familles"

Hierarchisation et Ethocentrisme

La hiérarchisation est un élément important à prendre en compte, pour comprendre le mécanisme de la haine raciale. C’est à partir du XVIIIème siècle que les naturalistes européens se mettent à classer les êtres vivants, en espèces, familles, genres, etc. Les plus célèbres étant Carl Von Linnée et Georges-Louis Leclerc de Buffon, faisant entrer dans leur classement les êtres humains. Leurs travaux, serviront à construire une vision raciale du monde en créant des catégories d'êtres humains et les hiérarchisant entre eux et en s'appuyant sur des caractéristiques telles que la couleur de la peau, la mensuration, etc. Cette approche entraînera l’émergence d’un concept, celui de "supériorité", dont les conséquences auront un impact non négligeable au cours de l'histoire.

Pour qu'il y ait hiérarchisation d'un groupe vis à vis d'un autre, il faut s'appuyer sur des normes à suivre et c'est grâce à l'ethnocentrisme qu'il est possible de le faire.

L'ethnocentrisme, est le fait de considérer que le comportement de notre groupe (culture, religion, mœurs, etc.) est supérieur à celui des autres groupes et devrait devenir la "norme" à suivre pour tout le monde. Dès l'instant où nous considérons que les autres doivent se comporter comme nous, cela va automatiquement induire des jugements de valeurs, nous amener à hiérarchiser les autres groupes que nous considérons différents de nous. Cependant, chaque individu a une identité qui lui est propre, changeant en fonction de son histoire, de ses choix, de son environnement géographique, social,... Or l'ethnocentrisme, nous fait oublier cela et nous fait voir l'autre comme un "TOUT".

La construction de cette idéologie de la hiérarchie raciale se retrouve au fil des siècles dans l’iconographie. Elle s’introduit dans les discours savants comme dans les arts, puis se répandra peu à peu dans les cultures populaires, où elle est encore présente aujourd’hui. Croire en cette théorie a permis à un certain nombre d’individus de commettre un grand nombre d’actes de racisme allant jusqu’à des crimes et massacres de minorités :

  • Le massacre de 25 000 Rohingya en Birmanie depuis 2016.      
  • L'apartheid en Afrique du sud, faisant plus d' un million de morts entre 1948 et 1991.                        
  • Le massacre de 400 000 Roms et Tsiganes sous le régime nazi et plus de 6 millions de juifs.

Le racisme se fonde ainsi sur des principes, croyances, de différenciation, de stratification et surtout de hiérarchie des “races”, avec des “races supérieures” qui domineraient des “races inférieures”. Adhérer à ce type d’arguments, c'est croire qu’il existerait des races humaines différentes. Cependant de nombreuses recherches ont démontré au fil des années le contraire.

L'essentialisation

Le dernier élément à prendre compte dans le mécanisme du racisme est l'essentialisation.
Au cours de l'histoire, les individus ont été classés dans des catégories en fonction de certains traits physiques. Puis nous avons associé à chaque catégorie des caractéristiques morales, psychologiques ou comportementales, supposées immuables et transmises de génération en génération.
L'essentialisation réduit ainsi l'individu à une partie de son identité réelle ou supposée et le condamne à être enfermé dans une définition simpliste et figée de celle-ci.  Ainsi par essence, par nature, cette personne devrait agir de la sorte ou se comporter comme cela.
 
Exemple d'essentialisation :

Le naturaliste Carl Von Linné, en 1758 tente de classer l'ensemble des êtres humains en quatre races en fonction de caractéristiques devant les définir par essence :

  • L'homme blanc (Europeaus) : "esprit aiguisé et inventif, doux, gouverné par les lois"
  • Le rouge (Americanus): "obstiné, joyeux, libre, respectueux des coutumes"
  • Le jaune (Asiaticus): "hautain, avare, sévère, gouverné par ses opinions",
  • Le noir (Africanus), "rusé, indolent, négligent, gouverné par son caprice ou par la volonté de ses maîtres".

Même si la science a aujourd'hui démontré qu'il n'existait pas de race d'êtres humains, l'essentialisation perdure cependant dans nos sociétés, mais elle est fondée sur des catégories telle que la religion, l'origine géographique,...

La culture est ainsi perçue comme quelque chose de fixe et rigide, alors que les identités culturelles sont dynamiques et changeantes.

Mise en pratique : comprendre l'essentialisation à travers l'Histoire

→ les cartes "essentialisation"

Au cours de l'histoire de nombreuses personnes se sont appuyées sur des caractéristiques soit disant transmises de génération en génération pour rendre légitimes leurs actes de violence.
Par petit groupe de 4, les participant.es seront amené·es dans un premier temps à réfléchir à des situations qui ont eu lieu au cours de l'histoire jusqu'à aujourd’hui. Puis  devront choisir parmi leurs exemples ou la liste ci-dessous, une des situations et lister les caractéristiques physiques, psychologiques, culturelles, ayant pu être utilisés pour légitimer ces actes.*

Exemple : le génocide des juifs durant la seconde guerre mondiale :
Durant la seconde guerre mondiale, Le chancelier Hitler et le chef de la SS Himmler se sont appuyés sur des caractéristiques physiques et morales, pour légitimer la supériorité de la race aryenne. Ces dernières étaient, selon eux, déterminées par les origines raciales de chacun ; tout groupe, race ou peuple portaient en lui des traits qui se transmettaient immuablement d'une génération à l'autre. Personne ne pouvait échapper aux qualités, défauts, de la race à laquelle il appartenait. En s'appuyant sur l'idée que les êtres humains pouvaient être classés collectivement en tant que « races », chacune de celles-ci possédant des caractéristiques distinctives transmises génétiquement depuis l'apparition des premiers hommes. Ainsi pour eux les caractéristiques soit disant propres à la race aryenne étaient la norme à suivre. Cette dernière étant supérieure à toutes les autres et notamment à la race juive. Pour créer un sentiment de supériorité envers eux et légitimer leurs actes, ils vont ainsi véhiculer des stéréotypes, préjugés sur la communauté juive (la taille du nez, mâchoire saillante, figure de crapaud, cheveux frisés, l'odeur, peu scrupuleux, aime l'argent, le luxe,...). Les gitans, les personnes handicapées, les polonais, les homosexuels, les afro-allemands... étaient également identifiés comme des ennemis et des menaces pour la survie de la race aryenne.

Cemea

L'Holocauste, appelé aussi Shoah, est la persécution et l'assassinat de plus de six millions de juifs, organisés par l'État nazi et ses collaborateurs entre 1933 et 1945. D'autres minorités considérées comme des menaces pour la race aryenne seront aussi persécutées : les gitans, les personnes handicapées, les polonais, les homosexuels, les afro-américains ...

Voici une liste non exhaustive d'exemples pouvant être travaillés avec les groupes :

  • L'apartheid en Afrique du Sud
  • La ségrégation aux Etats-Unis
  • Le génocide des Tutsis au Rwanda
  • Le génocide arménien
  • Les ouïghours (Chine)