LA MÉDIATHÈQUE ÉDUC’ACTIVE DES CEMÉA

Les Grand·es Pédagogues >>> Gisèle De Failly

L’Éducation nouvelle dans la formation culturelle et pédagogique de tous les éducateurs.
Média secondaire

Gisèle de Failly, née en 1905 à Paris est issue d’une famille de l’aristocratie catholique. A la fin de ses études elle va petit à petit s’en éloigner, ses centres d’intérêt la poussant vers d’autres milieux. Elle passe son baccalauréat en 1927 et engage des études universitaires à la faculté des sciences de Paris. Elle obtient un certificat d’étude supérieure de mathématiques en 1928, un certificat en physique générale en 1929 et de chimie générale en 1930. 

Elle voyage aussi à l’étranger et découvre d’autres conditions et pratiques d’éducation que celle qu’elle a vécues.

En Angleterre elle découvre des écoles d’un type nouveau. Elle est en contact avec les idées de Claparède, de Ferrière, de Montessori, de Wallon...Elle découvre à Bruxelles l’école Decroly, en Suisse l’Odenwald Schule.

En 1932 elle participe au VI eme congrès de la ligue internationale de l’éducation nouvelle à Nice en tant que militante du GFEN (groupement français pour l’éducation nouvelle). Elle y rencontre Célestin Freinet et visite l’école de Saint Paul de Vence. Elle revient enthousiaste de ce congrès et entre en relation avec les écoles nouvelles de la région parisienne et collabore avec elles. En même temps elle travaille un temps à « La nouvelle Education », une association dirigée par Mme Guéritte et R. Cousinet.

Toutes ces expériences pédagogiques l’amènent à s’engager dans une nouvelle formation universitaire et elle passe en 1934 un diplôme d’étude de psychologie appliquée à l’institut de psychologie de Paris. Elle y suit les cours de Henri Wallon et en été 1934 un cours de Maria Montessori.

Entre la fin de l’été 1934 et 1936 Gisèle de Failly travaille pour une municipalité de l’Ile de France à Suresnes comme « chargée de la coordination des éléments du service social » (En fait directrice). Le maire socialiste de Suresnes, Henri Sellier (qui deviendra le ministre de la santé du Front populaire) avec son secrétaire général Louis Boulonnais y expérimente les prémices d’un large service social d’initiative publique. Gisèle de Failly se trouve là à la rencontre entre les questions éducatives et les questions sociales qui vont être au cœur de ses réflexions et de son action durant toute sa vie. Mais elle doit quitter ce travail difficile pour des raisons de santé.

Cherchant du travail elle va être mise en contact et embauchée par l’hygiène par l’exemple (HPE). Le rôle principal de cette association est d’équiper les écoles primaires en matériel sanitaire et de diffuser les notions d’hygiène dans l’enseignement public. Sur la proposition d’une institutrice la secrétaire générale de l’HPE, Germaine Mascart va missionner Gisèle de Failly pour organiser durant l’été l’accueil d’enfants de la ville dans des écoles aménagées à la campagne. Cela séduit de suite Gisèle de Failly qui y voit la possibilité de mettre concrètement en œuvre les pratiques pédagogiques qu’elle souhaite promouvoir et qui diffèrent de celles des colonies de vacances caserne déjà existantes : petits groupes, vie quotidienne à caractère familial rapprochant les adultes des enfants, intégration plus facile dans le milieu...Ce sera la « maison de campagne des écoliers ». La première aura lieu en Juillet 1936 à Saint Maurice en Moselle dans les Vosges et c’est en fait deux séjours qui vont avoir lieu durant cet été. C’est à l’occasion de ces séjours de vacances collectives qu’elle va constater le manque de compétence des personnes qu’elle recrute et qu’elle prend conscience de la nécessité de former toutes ces personnes. Elle écrit à ce sujet un article dans le bulletin de l’Hygiène par l’exemple dans lequel elle évoque un projet de formation où la psychologie de l’enfant tiendrait une place importante, articulée à une prise en compte des milieux de vie.

Gisèle de Failly va travailler à l’HPE jusqu’en septembre 1936 mais elle va rester militante de l’association. A partir de la rentrée scolaire 1937 elle devient institutrice suppléante à Colombes puis à Courbevoie en 1938.

Mais parallèlement à ce métier d’enseignante Gisèle de Failly va se lancer dans ce qui va être l’engagement de sa vie, la formation selon les principes de l’Éducation nouvelle et par des méthodes d’éducation active, des personnes qui auront la tâche et la responsabilité d’encadrer les activités de vacances et de loisirs collectifs des enfants et des jeunes.

En décembre 1936 Gisèle de Failly rencontre André Lefèvre par l’intermédiaire d’une inspectrice de la jeunesse et des sports, Mme Trenel qui voudrait mettre en place un premier stage de formation de cadres de jeunesse. André Lefèvre, commissaire national de Eclaireurs de France a déjà une expérience d’encadrants à la « maison pour tous » de la rue Mouffetard et surtout au camp école des EDF à Cappy dans l’Oise où se forment les chefs éclaireurs. Gisèle de Failly a une vision traditionnelle du scoutisme et est donc sur ses gardes mais rapidement les deux personnes se retrouvent sur leurs visions des centres de vacances (mixtes, de petite taille, avec beaucoup d’activités en lien avec la nature) et de la formation (stage court, internat, proximité instructeurs/stagiaires, pratique plus que théorique). A partir de là Gisèle de Failly va se démener pour trouver des aides financières et les premiers stagiaires. Elle rencontre Léo Lagrange sous-secrétaire d’État aux sports et aux loisirs, Cécile Brunschwicg sous-secrétaire d’État à l’Éducation nationale, Suzanne Lacore sous-secrétaire d’État chargée de la protection de l’enfance dont dépendent alors les colonies de vacances. Henri Sellier lui donne une subvention de 10000 francs et Jean Zay ministre de l’Education Nationale signe une circulaire pour fournir des stagiaires enseignants et soutenir son initiative malgré quelques réticences au sein de son administration.

Le premier stage organisé par André Lefevre et Gisèle de Failly va se dérouler à Pâques 1937 à Beaurecueil à côté d’Aix en Provence. Ce sera le premier « centre d’entraînement pour la formation du personnel des colonies de vacances et des maisons de campagnes des écoliers ». Il regroupera 60 stagiaires et est encadré par un nombre important d’instructeurs : Gisèle de Failly et Germaine Mascart  pour l’HPE, Henriette Goldenbaum que connaissait Gisèle de Failly pour ses idéaux d’Education nouvelle et ses compétences en chants, deux inspectrices générales de l’Education Nationale Mmes Giraud et Angles et une majorité de membres des EDF dont Henri Lefèvre qui dirigea le stage et André Schmitt qui sera par la suite une référence incontournable aux CEMEA pour les activités et la vie physique et qui dirigera longtemps le centre de Vaugrigneuse en région parisienne. Un deuxième stage se déroulera quelques jours plus tard, en mai à Breteuil sur Iton que Gisèle de Failly et André Lefèvre encadreront aussi avec quelques instructeurs de Beaurecueil mais aussi des nouveaux venus.

Quatre stages ont lieu en 1938 qu’elle encadre tous. En 1939 onze stages se déroulent dont six en banlieue parisienne à la demande de la ville de Paris. Cette année verra aussi la mise en place du premier stage de directeur de colonies de vacances à Andernos en Gironde.

Mais Gisèle de Failly est toujours enseignante. Elle est titularisée en 1939 et travaille cette année-là à Meung sur Loire. De 1940 à 1944 elle enseignera dans différents établissements parisiens.

Durant cette difficile période ou les stages peuvent parfois cacher ou héberger des juifs, des réfractaires au STO (le service du travail obligatoire en Allemagne) ou des résistants, Gisèle de failly continue de travailler à leur développement surtout dans la zone nord occupée par les allemands. D’autres militants arrivent à en organiser dans d’autres régions. C’est en 1941 qu’Henri Laborde militant des EDF va intégrer l’équipe de direction d’un stage et va entrer dans l’histoire des CEMEA. L’année 1944 va être riche en évènement pour le mouvement mais surtout pour le pays tout entier. L’association se dissout le 21 mai sous la pression de la milice ; mais elle se recrée quelques mois plus tard, après la libération, le 16 septembre par une nouvelle assemblée générale constitutive. La dénomination définitive « Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active » est décidée à cette AGA cette occasion Gisèle de Failly devient directrice des CEMEA quand Henri Laborde devient délégué général. En octobre elle est mise à disposition de l’association. Elle est aussi responsable des publications et va créer en 1946 la revue « Vers l’éducation nouvelle » et les Éditions du scarabée. Cette année-là voit aussi la disparition d’André Lefevre. Avec Henri Laborde elle fonde le 1er octobre 1947 la nouvelle école de Boulogne qui va exister jusqu’en 1956. Comme directrice elle ne s’occupe pas que de pédagogie et en 1949 elle va diriger le premier stage de secrétariat pour le personnel de l’association.

En 1963 toujours directrice de l’association et toujours mise à disposition Gisèle de Failly intègre le corps des adjoints d’enseignement puis sera titularisée comme surveillante générale en 1966 et affectée « pour ordre » au lycée Joseph Fabre de Rodez dans l’Aveyron jusqu’ à sa retraite de l’enseignement public. Mais le 27 janvier 1967 Henri Laborde décède et Gisèle de Failly devient déléguée générale. Elle est donc à la tête des CEMEA durant les évènements de 1968 et positionnera clairement l’association aux cotés de la jeunesse mobilisée.

A l’assemblée générale du 25 juin 1969 Gisèle de Failly annonce qu’elle souhaite quitter la fonction de déléguée générale. Après un accord du comité national Denis Bordat est élu au poste de délégué général. Début 1970 Gisèle de Failly prend sa retraite de l’enseignement public.

Mais elle va demeurer une militante active du mouvement. Elle est secrétaire générale du conseil d’administration de 1969 à 1979. Entre 1981 et 1983 elle est vice-présidente et assure la présidence par intérim en 1984 au départ de Louis Cros et avant l’élection de Francine Best. Elle conserve d’ailleurs un bureau rue Saint Placide au siège de l’association nationale et anime avec Pierre Rose puis avec Claude Vercoutère la commission pédagogique nationale. Elle s’investit dans des journées d’études, elle intervient dans des regroupements nationaux et territoriaux, dans des stages et continue de porter les valeurs et les idées des CEMEA et de l’Éducation nouvelle à de multiples occasions. Sa dernière intervention publique aura lieu le 10 juin 1987 à l’occasion du 50eme anniversaire des CEMEA à l’université de Paris X Nanterre. Elle décède le 4 Mars 1989 à Paris.