Jeux plastiques à consignes, une entrée possible dans l'activité

A l’image de nombreux moyens d’expression, le dessin, la peinture, le modelage sont des activités qui ont leurs lois propres. Non seulement pour leurs aspects techniques mais également pour ce qui touche au développement des rapports entre l’individu et ses œuvres
Lorsque le jeune enfant commence à s’exprimer, il suffit de mettre en présence, un individu, du papier, des couleurs, un support, pour que l’envie de peindre éclate comme un besoin vital. Toutes les occasions sont bonnes pour s’exprimer en toute liberté. Personne, ni l’enfant, ni l’adulte ne se posent alors la question de la stricte conformité à la nature ou aux êtres vivants, ni aux effets produits. Seul importe qu’une personnalité se manifeste.
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Mais nous avons remarqué que bien souvent après une période de production libre et intense, les enfants en grandissant cessent petit à petit d’utiliser les langages plastiques. Hier, aux yeux de tous les signes émis remplissaient leur rôle ; dorénavant ils ne donnent plus satisfaction à leurs auteurs.

Pour être juste, il existe encore quelques tentatives de copie, des essais de caricature ou des dessins à tendance pornographiques, mais le bel élan vers une création personnelle peut s’éteindre. Les enfants ont perdu confiance dans la valeur expressive de leurs œuvres.

Cette impression d’échec est compensée par l’envol d’autres moyens d’expression qui utilisent plus particulièrement le corps, la voix, la musique instrumentale. L’époque de l’enfermement sur soi commence et peut se prolonger par la tenue du journal intime et de l’intense camaraderie élective.

Des adultes sont souvent désorientés devant cette situation alors qu’ils sont persuadés de l’intérêt des activités d’expression dans le développement des enfants et leur épanouissement.

Que faire ? Que proposer ? Quelle attitude prendre ?

S’attacher à transmettre d’une manière active les rudiments des techniques expressives. Par exemple sous forme de questions/réponses, chacun·e ayant la possibilité de formuler la question ou d’apporter la réponse. C’est quoi l’aquarelle ? Le pastel ? Comment fixer un trait de fusain ? Comment obtenir un rose bien présent ? Un vert olive ? Évidemment cela risque d’évacuer une grande part de création personnelle et d’émotion.

D’autres adultes se réfugient dans la transmission d’une sorte d’histoire de l’art adaptée, témoignant à l’aide de documents des grandes périodes : la préhistoire, l’art roman et gothique, l’art moderne.

Dans ce cas, il faut disposer de documents lisibles, pouvant êtres analysés et comparés, mais il est nécessaire aussi que le « maître » soit lui-même intéressé, sinon compétent.

Ou bien, d’une autre manière l’adulte invite les enfants à mener une enquête active dans le grand livre ouvert de la nature ». C’est ce que l’on a longtemps nommé, les études documentaires. Mais pour être suffisamment intéressantes ces études, le crayon ou le pinceau à la main, doivent quitter la primevère du printemps et la feuille colorée de l’automne pour atteindre des formes et des couleurs plus aguichantes ? le sujet choisi devant d’abord étonner. Avec ces activités, on entre dans des exercices qui sentent l’école spécialisée et ne se situent pas obligatoirement en réponse à l’attente de tous les enfants.

Entrer en création et jouer avec l’imaginaire

Les jeux que nous proposons maintenant sont d’un tout autre intérêt. Ils constituent le corps d’une manière particulière d’entrer en création et de jouer avec l’imaginaire.

Car d’un certain point de vue, ils forment une sorte de mini encyclopédie des moyens d’expression encore à découvrir que chacun·e peut conjuguer à sa guise. Cela va du trait que l’on conduit à la règle jusqu’à la goutte colorée qui tombe sur un papier humide pour devenir une tâche vagabonde.

La plupart de ces procédés réunis pour notre plus grand plaisir viennent en partie de l’observation de l’activité de l’enfant libre de ses gestes. L’estampage d’une pièce de monnaie, le pliage de deux bandes de papier l’une sur l’autre pour réaliser une construction en accordéon viennent tout droit des occupations traditionnelles enfantines. Il nous a suffi de mettre de l’ordre dans ces observations en y ajoutant la spécificité du traitement de chaque matériau capable d’ouvrir d’autres perspectives d’expression.

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Nous avons essayé de placer au même niveau d’intérêt des jeux comme «couleur en pluie», «fil tiré», ou «cent lignes» après les avoir testés et rassembler de nouveaux. Le catalogue ci-joint n’est pas fermé. Il appelle d’autres initiatives qui prendront leur place dans cette liste, la rendant plus universelle.

Il reste à s’expliquer sur la notion de consigne afin que le meneur de jeu, l’animateur d’un groupe d’enfants, l’éducateur qui souhaite faire des propositions dans l’ordre d’une éducation plastique aient de quoi mettre ces activités en mouvement, le plus souvent par la parole, la consigne contient donc les éléments nécessaires pour jouer.

La consigne crée le cadre du jeu. Elle doit rester simple pour être comprise par tous. Elle constitue en quelque sorte l’archétype de l’activité suggérée avec son cortège d’inventions positives. Dynamique, elle va à l’essentiel en gardant toute sa place à l’aléatoire. La consigne permet également, si le besoin s’en fait sentir, de stimuler la comparaison des productions, sans compétition. Il nous paraît impossible de dresser une liste des matériaux et d’outils à rassembler. A part peut être les différents papiers à réunir, c’est plutôt à un bric-à-brac insolite que nous faisons appel.

Souvent l’énoncé du jeu commence par choisir un papier qui sert de support dans un format 10 X 15 cm. C’est grosso modo, la taille d’une carte postale ordinaire ou le quart d’un format A4. Les expériences faites, prouvent qu’il vaut mieux au début s’en tenir à ces dimensions relativement modestes. Des surfaces plus importantes engagent d’autres gestes, plus de temps, des réflexions nouvelles au détriments des surprises plastiques. Si, aux yeux des joueurs, les résultats paraissent limités, il est possible de chercher une présentation plus collective par une juxtaposition, une frise par exemple, comme le montre l’utilisation de plusieurs pliages en accordéon.

Pour un bon déroulement

Au moment d’entrer en activité, il est préférable que les joueurs disposent déjà de quelques supports prédécoupés. Ensuite, dans le feu de l’action, ils peuvent découper leurs supports en utilisant un gabarit.

Les activités se déroulent plus normalement si l’on dispose d’un plan de travail qui peut être protégé par des feuilles de magazines jetées une fois maculées. Le nettoyage indispensable des outils est fait par les joueurs en fin de séance. On peut exposer ce qui n’est pas retenu après avoir satisfait à différentes consignes et mesurer leur intérêt et leur richesse en particulier dans le pouvoir qu’elles procurent d’une création quasi spontanée, il n’est pas rare que les joueurs s’imposent à eux-mêmes de nouvelles consignes.

Les résultats, outre qu’ils sont plastiquement inattendus, peuvent procurer beaucoup de plaisirs esthétiques mais on ne peut oublier qu’ils sont à la base d’une habileté manuelle propre à être cultivée. Une preuve nous en est donnée par l’envie que manifestent les joueurs de recommencer leurs expériences. Cette attitude englobe non seulement la recherche de gestes mieux maîtrisés, mais aussi l’entraînement d’une vision de plus en plus fine : est ce droit ? Où se situe la moitié ? Sans recours aux instruments métriques.

Il fait garder toutes les situations garantissant l’aspect aléatoire des travaux, afin que ces activités continuent à nous étonner en nous formant.

Jeux plastiques à consignes

Une entrée possible dans l'activité

Dossier n°12 des cahiers de l'animation

L'activité plastique - Dessin, peinture
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