Se maquiller

L’activité maquillage suscite beaucoup d’intérêt chez certains enfants. Mais elle n’est pas neutre, elle engage en effet la personne et touche à l’identité. Elle demande de ce fait de respecter certaines règles pour en faciliter l’accès
Média secondaire

Image par mcardec de Pixabay


Se maquiller participe de l’évolution de l’enfant, de son grandir, même si toute expérience de maquillage n’est pas heureuse (refus, pleurs) parce qu’il s’agit d’une rencontre avec l’inconnu, un inconnu qui est soi mais qu’on découvre, qu’on n’a jamais vu comme cela. C’est en quelque sorte un écho de l’image, une modification ponctuelle du visage mais aussi pour celles et ceux qui le choisissent une façon de prendre le risque de se voir autre pour un temps. Et le faire soi-même laisse une liberté plus grande et préserve l’intimité, la zone de confort pour peu que les conditions de sécurité affective soient favorisées, ainsi que connues les techniques qui facilitent l’autonomie et la réussite de l’aventure.

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(…) original et spécifique, le maquillage est un outil médiateur entre soi, son image et soi et l’autre. Le jeu des transformations qu’il permet développe la créativité. Mais il suppose la capacité (au sens de possibilité) de l’enfant de supporter cette sorte d’altération (devenir autre) et d’introduire un possible écart, un possible jeu pour en jouer, comme nous venons de l’évoquer plus haut.

Tout comme le masque, le maquillage cache, révèle et développe des combinatoires à l’infini qui chez l’enfant sont de véritables expériences identificatoires : à la différence du masque, objet déposé au-devant de soi, le maquillage, matière colorée à même la peau, est une trace éphémère mais qui s’inscrit pour un temps et ouvre le jeu…

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...rituels à mettre en place dans l’espace de transformation
  • Choisir avec attention l’espace de transformation, lieu privilégié permettant l’intimité et la protection des passants, parents et enfants qui attendent (quand il s’agit d’un atelier ouvert).
  • Privilégier la disposition « loge de théâtre » où chacun est face à un miroir, plutôt qu’un groupe autour d’une table.
  • L’animateur se placera derrière ou à côté de l’enfant qui se maquille plutôt que devant lui. Si l’enfant se fait maquiller, lui donner ou lui mettre à disposition un miroir dès le début du travail
  • Donner les moyens à l’enfant de découvrir son visage dans toutes ses dimensions et proposer bandeaux ou pinces pour dégager franges et coiffures longues.
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  • Mettre une crème de base. Le rituel du massage du visage avec la crème de base permet à l’enfant non seulement de protéger sa peau mais de s’approprier déjà le volume de son visage et «de s’introduire» à ce moment. Pour les plus petits en ateliers pédagogiques, on peut ainsi nommer les différentes parties du visage pendant ce massage fait avec les deux mains par l’enfant sur lui-même. Il est pertinent de proposer que ce massage se fasse les yeux fermés. Cela développe l’intériorisation et l’intégration du schéma corporel du visage. Cela pose aussi le démarrage d’une concentration permettant à fois la naissance du personnage et le bon déroulement de la séance.
  • En atelier ouvert au public avec une libre circulation dans le cadre de fêtes, prévoir au minimum trois animateurs. L’un coordonne tout l’espace, il est nécessairement non maquillé. L’un est garant de ceux qui se maquillent seuls. Le dernier maquille les enfants.
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  • La création du maquillage peut s’appuyer sur des documents  mis à disposition ou affichés. Privilégier les documents issus des archétypes de l’histoire du maquillage et du théâtre, de l’histoire des traditions masquées, voire de l’histoire de l’art, par exemple photos de tableaux figuratifs ou abstraits. Cela vaut mieux que tous ces livres qui inondent le marché de l’édition proposant des photos d’enfants maquillés et donc empêchant la créativité. Le modèle doit être porteur d’identification.
Le maquillage est porteur de sens
  • Une proposition de maquillage n’a de sens que si un temps conséquent peut y être consacré. Pour les ateliers de quartier et les stands de fête, vérifier avant que l’enfant ne s’installe (avec lui et ses parents) qu’il est disponible au moins vingt minutes s’il se maquille lui-même. Faire attention (…) d’éviter le maquillage « à la chaîne » et d’instaurer toujours une véritable rencontre. Il faut prendre le temps de demander son prénom à l’enfant, s’il s’est déjà maquillé et ce qu’il désire comme maquillage.
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  • Même si nous avons évoqué plus haut que le maquillage est avant tout une rencontre avec soi, il ne faudrait pas pour autant délaisser l’expérience d’être maquillé. L’animateur en ce qui le concerne doit avoir vécu sur son propre visage les deux situations : se maquiller soi-même et être maquillé par quelqu’un. d’autre part il devra s’initier à l’art du maquillage dans des stages de formation.
  • Suivant les projets, le maquillage sera l’élément principal de la rencontre avec toute la magie de la transformation jusqu’à la coiffure. Dans d’autre cas il sera point de départ du personnage de théâtre comme le masque dans le travail d’acteur et sera suivi d’un jeu théâtral. D’autre fois il sera le point d’appui d’un grand jeu ou, pour les plus jeunes, une véritable séance de découverte psychomotrice.
Matériel à prévoir
  • Un miroir par enfant plutôt qu’un grand miroir central commun, pour privilégier la concentration et l’intimité
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  • Une serviette par personne, posée sur la table pour définir l’espace de transformation.
  • Des bandeaux et des pinces à cheveux.
  • Une crème de base pour protéger la peau et faciliter le démaquillage. Dans les ateliers en extérieur beaucoup d’enfants attendent de se faire maquiller. La pose de la crème de base permet un moment de rencontre avec l’adulte et l’enfant et fait entrer ce dernier dans l’espace de transformation.
  • Des pinceaux et des petites éponges rondes. Prévoir des tailles différentes de pinceaux. Dans le cas où l’enfant se maquille seul, on conseille à l’animateur de montrer sur sa propre main comment se manipule éponges, pinceaux et produites. Il montre aussi que le produit n’est pas dangereux puisqu’il en met sur sa peau.
  • Des gobelets pour l’eau, un par personne. Penser à changer souvent l’eau par mesure d’hygiène.
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  • Mettre à disposition une gamme de couleurs pour éviter les choix stéréotypés ou arbitraires. Privilégier les couleurs primaires et initier l’enfant à la fabrication de couleurs secondaires.

Pour rappel : le bleu, le jaune et le rouge sont les couleurs primaires, le vert est obtenu en mélangeant du bleu et du jaune, l’orange à partir de jaune et de rouge et selon le dosage rouge et bleu donnent ou marron ou violet. Il convient d’éviter le rose tyrien dont le pigment est difficile à démaquiller.

  • Ne pas abuser des paillettes, juste comme ponctuation d’un maquillage pour la magie et la féerie, qui concluent en beauté la transformation. C’est l’animateur qui les pose. Penser de demander à l’enfant de fermer les yeux.
  • Éviter les crayons (utiles toutefois pour dessiner des moustaches de chat)
  • Éviter les fards crèmes car leur consistance crée une ambiguïté avec la crème de base. Ils renforcent aussi le barbouillage au détriment de la sensibilisation à l’art du maquillage en tant qu’art pictural.
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  • Éviter les fards gras (craies ou sticks) utilisés dans le cadre du théâtre.
  • Du matériel pour se démaquiller (coton et démaquillant) pour les enfants qui le souhaitent. Si l’enfant désire partir avec son maquillage, lui expliquer comment se démaquiller chez lui (le maquillage à l’eau se dilue à l’eau tiède, au savon (attention aux yeux) ou avec un démaquillant.
  • Enfin cuvettes et sceaux (pour l’eau sale et l’eau propre) compléteront cette liste s’il n’y a pas de point d’eau proche ■

 


D’après un texte de Florence Chantriaux et Annick Eschapasse publié dans le n° 24 des Cahiers de l’animation vacances loisirs.