Le Bafa est un moment privilégié pour sensibiliser aux violences sexuelles et sexistes

Propos recueillis par Laurence Bernabeu
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Alexis Demoncheaux-Wemeaux est animateur et directeur d’accueils collectifs éducatifs de mineur·es depuis presque 15 ans et formateur depuis 2013. Il est aujourd’hui responsable "Animation volontaire" à l’association nationale des Ceméa.
Média secondaire

Apprendre à passer une serpillère, à laver la vaisselle ou à nettoyer soi-même la lunette des toilettes sans compter sur maman pour qu’elle le fasse après soi.

Le Bafa est-il le bon moment pour sensibiliser au sexisme ?

Les violences sexistes et sexuelles sont inscrites dans la société et toute vie collective, que ce soit en accueil collectif de mineurs ou en formation Bafa, induit des comportements genrés et discriminants.  Notre rôle, en tant qu’acteurs éducatifs et organisme de formation, est de contribuer à en finir avec la reproduction des stéréotypes pour faire changer les comportements et les a priori. D’ailleurs, la charte contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) signée en juin 2023 nous impose désormais « d’intégrer la lutte contre les VSS dans le parcours de formation ». Aux Ceméa, il nous semble essentiel que les jeunes qui passent leur Bafa comprennent qu’ils et elles seront des acteurs éducatifs qui ont un impact sur les représentations et les comportements des jeunes et des enfants qu’ils et elles vont encadrer. 

Comment leur faire prendre conscience de ces fonctionnements genrés et discriminants ?

La vie collective est un excellent laboratoire, notamment pour ces jeunes qui vont souvent vivre en passant leur Bafa une première expérience hors du cocon familial ! Notre rôle est de faire qu’ils et elles puissent questionner ce qu’ils vivaient jusque-là comme une évidence au sein de la famille, la répartition genrée des tâches par exemple. Comment s’y prend-on ? Il s’agit parfois juste de faire avec eux une partie du chemin qui n’a pas été fait à la maison. C’est tout simplement apprendre à passer une serpillère, à laver la vaisselle ou à nettoyer soi-même la lunette des toilettes sans compter sur maman pour qu’elle le fasse après soi.  Il s’agit de responsabiliser les jeunes sur leurs comportements dans la collectivité. Les « groupes de services » qui permettent de tenir propres les locaux sont un excellent espace d’entraînement….  L’équipe d’animation va aussi avoir à coeur d’observer les fonctionnements au prisme des assignations genrées pour aider les jeunes à conscientiser, à mettre des mots là-dessus. Cela peut se faire notamment lors des points de régulation sur la vie collective, où il sera possible – et cela doit être énoncé dès le début de la formation -  de partager ses ressentis et ses observations sur des comportements sexistes ou homophobes. Enfin, l’équipe travaille l’ensemble des activités de façon inclusive.  Par exemple, si on propose un foot sans étape intermédiaire, on est sûr que c’est surtout les garçons qui rejoindront l’activité. Mais si  on propose une série de jeux qui isolent les compétences, comme emmener la balle aux pieds derrière la ligne en relais, organiser une passe à dix qui oblige de distribuer le ballon à l’ensemble de l’équipe, faire un concours de tirs au but, cela permettra ensuite à chacun et chacune de se sentir autorisé à rejoindre une partie de foot.

Comment l’équipe se prépare-t-elle à cette sensibilisation ?

L’important est en effet qu’elle se prépare, qu’elle ait travaillé en amont ces questions, et idéalement, que chacun et chacune ait été formé et sensibilisé aux VSS et soit « raccord » ! Et là encore, le passage par les méthodes actives d’éducation est opérant car elles favorisent le débat, autorisent la contradiction, et même le politiquement incorrect. Il faut pouvoir passer par ces étapes-là pour ensuite défendre une approche commune de ce qui est sexiste ou ne l’est pas. À partir de quand une situation est-elle sexiste ? Comment fait-on pour ne pas transmettre ces modèles de domination et ces stéréotypes ? Comment décide-t-on d’intervenir quand un jeune tient des propos homophobes ou sexistes ? Faut-il le prendre à part, favoriser la régulation au sein du groupe ? Tout cela doit être abordé en amont et pendant le déroulé du stage.

Crédit photo : Ceméa Belgique

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