Tous les trafiquants sont-ils noirs ou arabes ? Un double point aveugle dans les prisons françaises

La surreprésentation des Français issus de l’immigration africaine dans la population pénale est-elle un mythe ? Quels sont ses liens réels avec le trafic de stupéfiants ? Des études sur l’incarcération de masse des Afro-Américains nous aident à comprendre
Média secondaire

La surreprésentation des Français issus de l’immigration africaine dans la population pénale peut-elle servir de révélateur de certains tabous qu’il est légalement interdit de mentionner ? Les études américaines sur l’incarcération de masse des Afro-Américains nous aident à comprendre les mécanismes étroits qui existent entre les mots « race » et « drogue »

The New Jim Crow est un best seller publié en 2012 par Michelle Alexander, qui analyse la guerre à la drogue livrée aux ÉtatsUnis comme une entreprise raciste. Le sous-titre, Mass Incarceration in the Age of Colorblindness, souligne l’intention de l’auteure de présenter l’incarcération de masse comme l’instrument privilégié du New Jim Crow, la nouvelle société de caste selon la terminologie raciale américaine. En effet, toutes les statistiques corroborent l’idée que l’usage de psychotropes illicites sert de prétexte pour enfermer la population noire derrière les barreaux, dans une proportion qui frôle 80 % des adultes de sexe masculin.

Le « colorblindness », expression anglosaxonne qui signifie approximativement « aveuglement sur les couleurs », est un concept particulièrement éclairant en ce qui concerne nos propres points aveugles hexagonaux, d’autant qu’il est doublé d’un « drugblindness » qui renforce la cécité générale sur ces sujets.

Le sida en banlieue, un secret de famille

Dans les années 1980, la désormais historique « épidémie d’héroïne parmi les usagers de drogues par voie intraveineuse » a rempli les prisons françaises d’enfants des immigrations africaines et nord-africaines, pris dans les rouages de la « guerre à la drogue » chère à Richard Nixon. Condamnés pour trafics, cambriolages, vols à la tire, agressions ou braquages, tous ces petits délinquants étaient alors reliés à la poudre de façon directe ou indirecte, du fait de l’importance prise par le phénomène dans les cités de banlieue, et les cours de promenade des prisons françaises ont commencé à ressembler à leurs homologues d’outre-Atlantique. (...)

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