« En situation de handicap » – Vraiment ?

En situation de handicap plutôt que handicapé, par respect pour la personne dit-on. La réalité en est-elle changée? En deçà des intentions l’étiquetage crée autant la catégorie ouvrant des droits spécifiques que l’exclusion de la société des normaux
Média secondaire

Le handicap ou l’épreuve du réel

Le handicap, tout le monde sait ce que c’est : une réalité que l’expérience première donne pour évidente, la différence trop visible, physique ou psychologique, définitivement acquise, dont l’origine est objectivement établie (génétique, accidentelle ou pathologique), et qui rend celui qui le « porte » inapte à certaines tâches sociales communément assumées. Le handicap semble se donner sans ambiguïté, il relèverait du constat ; c’est cette visibilité immédiate qui le rend à la fois si incontestable, si effrayant, ou si dramatique. Dans le regard commun donc, le handicap se réduit à une personne, malencontreusement affligée, la pauvre. Le handicap se superpose à l’identité, jusqu’à l’absorber, et marque l’individu dans sa différence. Cette réduction comporte un enjeu : elle a pour effet de délimiter une rassurante normalité. Étiqueté, soigneusement confiné dans sa catégorie, le barbare, l’étranger n’est plus menaçant. On feint de l’oublier, mais cette opération ségrégative est précisément ce qui fonde la force communautaire, via une fiction identitaire, ici celle des gens normaux. La société moderne s’est bien construite et affermie contre les handicapés (mais aussi contre les fous, les vieux, les pauvres, les Arabes... enfin bref, tous les improductifs), et cette logique d’exclusion n’est pas prête de faiblir, au contraire. On sait bien le succès aujourd’hui réactivé du mythe d’une identité réduite à des caractères repérables, et la pression que subissent en France les étrangers (...)

CAIRN.INFO - CHERCHER, REPERER, AVANCER

Distribution électronique Cairn.info pour ERES

© ERES. Tous droits réservés pour tous pays.

Lire l'article